Les MARES sont avant tout des ZONES HUMIDES. La loi sur l’eau du 3 janvier 1992 (article 2), définit les zones humides comme : « des terrains, exploités ou non, habituellement inondés ou gorgés d’eau douce, salée ou saumâtre de façon permanente ou temporaire ; la végétation quand elle existe y est dominée par des plantes hygrophiles pendant au moins une partie de l’année »
Les mares des Pyrénées Atlantiques
Mare ou étang ?
La définition des mares issue du Programme National de Recherche sur les Zones Humides (Sajaloli & Dutilleul, 2001) fait aujourd’hui encore référence mais elle ne permet pas à coup sûr de départager mares et étangs.
En effet, ces deux types de zones humides peuvent être définis comme des étendues d’eau stagnantes ou à très faible courant, d’eau douce, salée ou saumâtre, permanente ou temporaire, de taille variable, d’origine naturelle ou artificielle, en contexte rural, périurbain voire urbain, de profondeur généralement inférieure à 2 mètres, établies sur des sols et cuvettes imperméables et alimentées par l’eau de pluie, de nappe, de ruissellement, de source, de résurgence, de dérivation de cours d’eau, de fossé, …
Cependant, la profondeur des mares n’excèderait jamais 2 mètres alors que celle des étangs pourrait atteindre 10 mètres. Il est également admis que la taille d’une mare ne peut dépasser 5000 m² soit ½ hectares mais certains auteurs abaissent le seuil à 1000 m² pour différencier les deux milieux.
Les étangs ont dans bien des cas été très aménagés par l’Homme, qui au fils des siècles, a conçu des systèmes plus ou moins complexes de digues et canaux équipés de moines, vannes, seuils . Le degré d’aménagement du plan d’eau est donc un élément à considérer pour distinguer mares et étangs.
Quelle est donc votre mare ?
La très grande variété des mares est intimement liée à l’origine des mares et à la diversité des milieux dans lesquels on peut les trouver : cultures, jardins, friches, sources, pâtures, prairies humides, landes humides, bas-marais, marais, tourbières, boisements humides, forêts alluviales, pelouses et landes sèches, dunes, …
Les plantes les plus caractéristiques sont des végétaux adaptés aux sols plus ou moins humides ou gorgés d’eau comme les massettes, les roseaux, l’iris faux-acore, la menthe aquatique, les nénuphars, les potamots, le millepertuis des marais, la renoncule flammette, …
Il est également possible de caractériser les mares selon leurs usages passés ou actuels : mares agricoles, d’abreuvage du bétail, de lutte contre les incendies, de lavoir, de chasse, de pêche, d’agrément, mares pédagogiques, mares « à canards » …
On pourra encore simplement les qualifier selon la permanence de l’eau : mares temporaires ou permanentes mais aussi par rapport au degré d’ouverture du milieu et au type de paysage : mares de culture, de jardin, prairiales, bocagères, embroussaillées, forestières, d’alpage ou d’estive …
Cette dernière entrée typologique est souvent retenue dans le cadre des inventaires pour classer les mares.
Les mares à votre service !
Autrefois, les mares proches des habitations étaient utilisées comme réserves d’eau gratuites pour les activités quotidiennes telles que la cuisine, la lessive, la toilette … mais aussi pour l’abreuvage du bétail et pour éteindre les incendies.
Aujourd’hui, les mares conservent un intérêt primordial pour l’alimentation en eau du bétail et pour lutter contre les incendies. Au-delà de ces services rendus, elles témoignent des usages passés et servent également désormais de supports pédagogiques. Les mares d’agrément des pelouses et jardins privatifs participent au bien-être de leurs propriétaires. Elles peuvent être une ressource utile pour l’arrosage du potager ou des fleurs. Les plus grandes mares peuvent aussi servir de support aux activités de chasse et de pêche.
A l’instar de nombreuses autres zones humides, les mares rendent aussi d’importants services à la collectivité en participant à l’épuration naturelle des eaux de surface, à la limitation de l’érosion des sols et à la diminution des risques d’inondation mais aussi dans le maintien d’un paysage rural de type bocager.
Pourtant de taille réduite, elles abritent une formidable biodiversité et des espèces rares et menacées de disparition souvent protégées. Quand elles sont organisées en réseaux ou en trames, elles assurent des continuités écologiques pour un grand nombre d’espèces, permettant d’indispensables échanges entre les milieux aquatiques.
Une mauvaise image de « mare » …
De nos jours, quand elles sont proches des habitations, les mares occasionnent parfois une gêne pour les habitants : « concerts » nocturnes de grenouilles, piqures de moustiques …. Si elles ne sont pas clôturées, elles constituent un risque de noyade autant pour l’Homme que le bétail. Au même titre que d’autres zones humides, elles peuvent abriter et transmettre au bétail des bactéries pathogènes telles que la Leptospirose, également transmissible à l’Homme, et des parasites tels que la Grande Douve. Cependant, en règle générale, les mares sont bien souvent détruites pour des raisons économiques : drainage et comblement à des fins de production agricole, élargissement de chaussées, projets d’axes routiers et ferroviaires, urbanisation, décharges …
La principale cause de disparition des mares demeure donc leur comblement qu’il soit d’origine humaine ou même « naturel ». En effet, sans entretien, la plupart des mares est amenée à se combler et s’assécher progressivement et naturellement. Le drainage des mares, la pollution ou le captage de leurs eaux, accélèrent ces processus, appauvrissent considérablement le milieu naturel et altèrent leurs rôles fonctionnels pourtant utile à la collectivité.
Une surfréquentation et un surpiétinement des mares par le bétail peuvent entraîner une grave érosion des berges avec pour conséquence une destruction des ceintures végétales. Les déjections des animaux peuvent en outre causer une pollution nuisible au maintien de la biodiversité.
Un curage d’une mare avec des engins lourds et inadaptés peut être très impactant sur les berges et le fond de la mare et très destructeur pour la faune et la flore.
L’introduction dans la mare des espèces exotiques et invasives comme les jussies, le lagarosiphon, … les écrevisses américaines, les tortues de Floride ou encore les poissons rouges … risque fort de complètement bouleverser l’écosystème et de l’altérer quasi irrémédiablement.
Comment protéger les mares ?
Au niveau communal, les PLU et les cartes communales peuvent identifier et délimiter les mares au même titre que d’autres éléments remarquables du paysage (Articles L.123-1 7° et R 421-23 du Code de l’urbanisme). Ainsi, les travaux, installations et aménagements, ayant pour effet de supprimer ou de modifier les mares identifiées, doivent faire l’objet d’une déclaration préalable auprès de la mairie.
Les mares peuvent également intégrer des Zones Naturelles d’Intérêt Ecologique Faunistique et Floristique (ZNIEFF). Même si celles-ci n’ont pas de portée réglementaire directe, elles indiquent la richesse et la qualité du milieu naturel, notamment la présence d’espèces protégées. Les documents d’urbanisme (cartes communales, PLU, SCOT) doivent impérativement tenir compte de ces zonages et de la réglementation qui s’applique aux espèces protégées. Dans le cas contraire, la non prise en compte des ZNIEFF peut conduire à l’annulation du document d’urbanisme. La notification de la préservation des mares au sein des SAGE (Schéma d’Aménagement et de Gestion des Eaux) peut également être un outil de protection efficace à l’échelle de ces territoires.
La réglementation nationale sur les zones humides s’applique totalement aux mares. A titre d’exemple, en cas de projet d’assèchement, de remblaiement, d’imperméabilisation et de submersion d’une mare de plus de 1000 m² mais inférieur à 10000 m² , il est obligatoire de faire une déclaration de travaux auprès des services de l’Etat du département concerné (Décret n° 93-743). Par ailleurs, les mares abritent de nombreuses espèces protégées. Le non-respect de la réglementation qui s’applique à ces espèces peut entraîner une peine de 6 mois d’emprisonnement et de 9000 € d’amende (Art. 415-3 du Code de l’environnement).
De nombreux statuts d’aires protégées permettent de conserver ces milieux : Réserve Naturelle Nationale (RNN), Réserve Naturelle Régionale (RNR), Arrêtés Préfectoraux de Protection de Biotope (APPB), … et les mares sont aussi au cœur de la loi Grenelle II dans le cadre de la mise en place de la Trame Verte et Bleue (TVB) et doivent donc être prises en compte dans les Schémas Régionaux de Cohérence Ecologique (SRCE).
Les Plans Nationaux d’Actions (PNA) ciblent de nombreuses espèces protégées présentes dans les mares. Dans plusieurs régions des Plans Régionaux d’Action en faveur des Mares (PRAM) sont développés.
Enfin, les Zones Spéciales de Conservation et les Zones de Protection Spéciale constituent aujourd’hui le réseau des sites « Natura 2000 ». Sur ces territoires, les mares qui abritent des habitats et des espèces d’intérêt communautaire doivent être préservées.
Les amphibiens de nos mares menacés par un champignon microscopique !
La chytridiomycosis est une maladie infectieuse qui touche 1/3 des amphibiens au niveau mondiale. Elle aurait été introduite dans l’hémisphère Nord par une petite grenouille originaire d’Afrique du Sud puis en France depuis les Etats-Unis avec l’introduction de la Grenouille taureau. Même si la maladie n’est pas transmissible à l’Homme, ce-dernier peut la véhiculer au contact de l’eau d’un milieu aquatique à un autre.
Le chytride (Batrachochytrium dendrobatidis) est capable de survivre au moins 12 semaines dans l’eau d’une mare et peut entraîner la mort de quelques individus ou au contraire décimer des populations entières. Dans les Pyrénées où l’infection sévit depuis 2003, les trois espèces les plus menacées sont l’Euprocte des Pyrénées, la Salamandre tachetée et le Crapaud accoucheur. Depuis cette date des chercheurs du CNRS ont montré une inquiétante et fulgurante progression de la contamination notamment sur les têtards de crapauds accoucheurs.
Les symptômes observables :
- Comportements anormaux : posture anormales, perte de reflexe, et léthargie
- Anomalie de la peau : lésions cutanées, ulcères occasionnels et hémorragie.
Si vous observez des animaux avec ces symptômes :
- Ne pas toucher l’animal
- Prévenir le CNRS (station de Moulis en Ariège) : +33 5 61 04 03 60 / +33 6 79 85 54 53
- Noter et fournir les informations suivantes : localisation, nombre d’individus malades, date photos
Si vous fréquentez une zone humide, pour éviter la propagation du champignon :
- Exposer si possible le minimum d’éléments au contact de l’eau.
- Avant de partir du site, nettoyer à l’eau à l’aide d’une brosse, vos vêtements, chaussures, bottes ou cuissardes … et le matériel ayant été en contact de l’eau avant de les désinfecter.
- N’utilisez pas de désinfectant dangereux pour l’environnement. Il est recommandé d’utiliser les désinfectants suivants : Halamid® dilué à 2% et Virkon® à 1% ou de l’eau de javel à 4%.
- Eloignez-vous de la zone humide pour procéder à la désinfection
- Tremper les petits éléments à désinfecter dans la solution et pulvériser le désinfectant sur vos bottes, vêtements, …
- Laisser sécher à l’air libre
Quelques questions à se poser avant de restaurer, aménager ou créer une mare :
- Pourquoi créer une mare dans quel but ?
- Existait-il une mare sur le terrain auparavant ?
- Comment la mare fonctionne-t-elle ?
- Quels ont été les usages passés, comment et pourquoi a-t-elle été créée ?
- Existe-t-il une ou plusieurs alimentations en eau ?
- Le sol est-il imperméable ou la nappe est-elle proche de la surface ?
- Qu’elle est la richesse biologique et le patrimoine écologique de la mare ?
- S’il y a dégradations, quelles en sont les origines ?
- Dans quel milieu et quel contexte se situe la mare, existe-t-il un réseau de mares ?
- Quelle réglementation s’applique à ma mare ou mon projet de création de mare ?
- Quel suivi de ma mare je vais mettre en place ?
Conseil : Faites-vous vacciner contre la Leptospirose si vous êtes au contact régulier des milieux aquatiques
L’aménagement d’une mare pour l’abreuvement du bétail ?
- Mettre en défens une partie ou l’intégralité de la mare en installant une clôture, des barrières ou un grillage.
- Puis, en fonction des budgets et du contexte, plusieurs possibilités : installation d’une pompe à prairie (ou à museau), aménagement d’un abreuvoir périphérique en dessous de la mare alimenté par un captage (système par gravité), aménagement d’une descente à la mare ou installation de pompes solaires ou éoliennes pour alimenter un abreuvoir …
Le curage
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Profondeur minimale : au moins 80 cm (garder une couche d’eau hors gel) sans percer la couche imperméable en général composée d’argiles,
- Périodes de curage : varient en fonction de la flore et la faune recensées (en automne et hiver le curage sera moins destructeur pour les amphibiens et la flore mais peut perturber l’hivernage de la Cistude d’Europe).
- Echelonner le curage sur plusieurs années en traitant successivement plusieurs zones de la mare.
- Laisser les boues du curage quelques jours à côté de la mare pour permettre à la faune (larves, adultes, …) de regagner l’eau.
- Exporter les boues sèches en dehors du site.
- Fréquence du curage : varie beaucoup en fonction du type de mares, de son environnement, des usages. … Il est conseillé d’attendre plusieurs années avant de procéder à un nouveau curage.
- En cas d’espèces invasives dans votre mare, demandez conseil à un spécialiste avant de curer et d’exporter les boues.
Les méthodes et techniques d’entretien, de restauration ou de création de mares sont nombreuses et diffèrent selon les contextes, les objectifs, les espèces … Il est donc conseillé de faire appel à une structure spécialisée et experte comme la CATZH64 avant d’entreprendre des travaux.
L’inventaire des mares des Pyrénées-Atlantiques
La Cellule d’Assistance Technique « Zones Humides des Pyrénées-Atlantiques (CATZH64) animée par le Conservatoire Régional d’Espaces Naturels de Nouvelle-Aquitaine, coordonne l’inventaire des mares du département des Pyrénées-Atlantiques. Débuté en 2012, cet inventaire se poursuit sur la forme participative. La CATZH64 peut également vous conseiller gratuitement sur la base d’une sollicitation, sur l’aménagement, la restauration, l’entretien et la création de mares.
L’enquête « mares »
Vous êtes propriétaire ou gestionnaire d’une ou plusieurs mares ou simplement un citoyen en connaissant près de chez vous, participez à l’inventaire des mares du département des Pyrénées-Atlantiques en remplissant l’enquête « mares » téléchargeable sur le site internet de la CATZH 64 : http://www.catzh64.fr
Pour tout renseignement vous pouvez vous adresser à : Thierry Laporte, coordinateur CATZH64 : t.laporte@cen-aquitaine.fr / tel : 05 59 04 88 00
Les évènements annuels sur les zones humides
Quatre évènements majeurs rythment les animations et sorties pédagogiques réalisées par le CEN Aquitaine sur les zones humides du département :
- Fréquence grenouilles
- JMZH
- La fête des mares
- Les chantiers d’automne
Pour le programme des évènements vous pouvez consulter les sites Internet de la CATZH64 et du CEN Aquitaine :
Auteurs : Textes : Thierry Laporte, Dessin : Maud Briand.